Supply Chain Manager et Directeur RSE : les raisons d’un malentendu5 min

Vague

Les liens entre transport et RSE sont flagrants. De même que ceux existant, souvent, entre un transport compétitif et un transport écologique. En théorie, l’un peut se mettre au service de l’autre, et inversement. Dans ce contexte, les directions RSE et Supply Chain sont évidemment pleinement conscients d’avoir besoin l’un de l’autre. Pourtant, dans les faits, elles communiquent peu entre elles. Et, plus généralement, le transport et la RSE ne sont pas aussi liés que ce qu’il faudrait. Pourquoi ?

La réponse est en fait assez simple : au niveau stratégique, chaque univers utilise des outils distincts, et ceux-ci ne permettent pas de fournir une base commune de compréhension, et donc, de décider ensemble.

Alors, dans certains cas, cela suffit à obtenir des résultats.

Pas besoin d’être Médaille Fields pour comprendre qu’en augmentant le taux de remplissage, on améliore la performance économique d’un trajet tout en polluant relativement moins.

Il existe quelques causalités évidentes de ce genre, qui permettent d’optimiser le transport tout en s’assurant des résultats environnementaux. Et la plus évidente d’entre toutes est qu’un véhicule récent consomme moins de carburant et pollue moins qu’un véhicule âgé.

En l’état, le principal levier RSE à disposition d’un Supply Chain Manager en matière de transport est donc d’inciter ses prestataires à s’équiper de véhicules plus propres.

Toutefois, il faut bien admettre que recourir à ce levier revient à se décharger de ses responsabilités sur les transporteurs. Ceux-ci, par ailleurs, renouvellent par eux-mêmes leurs flottes, et remplacent évidemment leurs vieux véhicules par des modèles récents, moins polluants.

Enfin, lorsqu’un transporteur renouvelle une partie de sa flotte, rien ne garantit à un chargeur qu’il bénéficiera systématiquement de véhicules récents. Une telle clause serait du reste impossible à contractualiser, car elle entraînerait un paramètre supplémentaire majeur pour un transporteur dans la gestion de sa flotte. Inutile de préciser que dans un contexte de grande sous-capacité, cela n’aurait strictement aucun sens.

En bref, il faut le dire, tout cela est assez artificiel. Et il n’y a pas de véritable décision, au sens d’arbitrage, puisque tout repose sur des liens de cause à effet préétablis qu’il suffit de quantifier plus ou moins précisément a posteriori. Ce qui se fait notamment à l’aide d’outils de reporting des émissions transport.

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Ceci étant dit, il est difficile de faire mieux : les indicateurs issus de ces outils, pour exacts qu’ils soient, ne permettent pas de lier RSE et transport. Ils ne sont, en somme, que des thermomètres. Ils ne parlent pas aux Supply Chain Managers, qui ne savent pas à quoi les raccrocher. Du coup, ces derniers ne peuvent aller au-delà de la cohabitation plus ou moins cordiale avec les directeurs RSE.

Il faut dire que les enjeux, et donc la pression, sont importants. Plus que jamais auparavant, l’impact environnemental de l’activité est au cœur des préoccupations des directions générales. Dans ce contexte, les Supply Chain Managers se voient de plus en plus reprocher de peser sur le bilan RSE de l’entreprise. Quant aux directeurs RSE, ils ne parviennent pas à trouver un point d’entrée vers le transport. Malgré toute leur bonne volonté, tous sont démunis faute de solutions.

Dans ces conditions, difficile construire ensemble une authentique vision écologique du transport. En effet, une telle vision impliquerait nécessairement d’arbitrer, de faire des choix entre les trois piliers du transport : coûts, qualité et impact environnemental.

Or, que se passe-t-il quand un dilemme se présente ? Quand une causalité n’est pas évidente ? Quand se présente la perspective de déshabiller Paul pour habiller Jacques ? Prenons un exemple : massifier les flux de deux journées de commande afin d’améliorer le taux de remplissage et de réduire les émissions peut sembler être une bonne idée. Mais quel impact cela aura-t-il sur les délais de livraison ?

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t à vide ! Là encore, il y a un arbitrage à faire.

Les outils de reporting ne faisant pas le lien avec la qualité et les coûts, et n’ayant de fait aucune valeur prévisionnelle dans ce genre de situation, les informations utiles manquent. Et, en conséquence, une prise de décision éclairée devient presque impossible.

Tout cela est à la fois le symptôme et l’une des causes d’un problème plus large : la RSE n’est, dans les faits, pas une véritable composante de la performance transport. Elle en est plutôt une conséquence, un à-côté plus ou moins heureux.

Pour changer la donne, il manque un maillon à la chaîne reliant transport et RSE. Celui qui permettrait une véritable collaboration entre deux fonctions par nature parfaitement complémentaires.